Comment s'"impriment" mais surtout s' "effacent" les souvenirs dans notre cerveau? Ces questions fascinent les neurobiologistes travaillant sur la memoire et son dysfonctionnement depuis des decennies. Encore H aujourd'hui, beaucoup de mecanismes demeurent inexpliques. Toutefois, l'exploitation par le cerveau de la plasticite des neurones fait de plus en plus consensus. On entend par plasticite la capacite qu'ont les cellules nerveuses de s'adapter a leur environnement, aux besoins ou aux experiences de l'organisme, notamment par la croissance de nouvelles connexions ou la formation de nouveaux neurones. Au fil des ans, les chercheurs ont constate que la plasticite implique, chez l'animal, l'accroissement des reponses neuronales assurees par le systeme de neurotransmission au glutamate, le principal neurotransmetteur excitateur du cerveau. Malheureusement, la plasticite n'a pas que de bons cotes. Si les recepteurs du glutamate deviennent tres sensibles, ils peuvent engendrer une forme de toxicite appelee "excitotoxicite". Cet etat, s'il n'est pas contre, entraine la mort des neurones. Plusieurs etudes impliquent l'excitotoxicite dans le developpement d'affections neurologiques (maladie d'Alzheimer, ischemie, maladie de Parkinson).;Dans le cadre de mes travaux au doctorat, nous avons cherche a mieux definir les bases des interactions entre les PLA2 et les recepteurs du glutamate ainsi que leurs consequences. En tirant profit de nombreuses methodes biochimiques ainsi que de la culture d'hippocampes de type organotypique, nous avons decouvert qu'une alteration de l'activite phospholipasique basale, c'est-a-dire independante du calcium (iPLA2), entraine une hausse dramatique de la sensibilite des recepteurs au glutamate de type AMPA dans l'hippocampe, une region cerebrale essentielle a la formation de la memoire. De plus, si cette perturbation persiste, elle favorise la mort des neurones. Il est cependant possible de contrer ce phenomene par un traitement specifique au DHA, un autre omega-3, l'acide eicosapentaenoique, s'averant sans effet. Fait interessant: l'inhibition irreversible de la iPLA2 provoque, chez des souris transgeniques, l'apparition d'un marqueur pathologique observe chez les patients souffrants de la maladie d'Alzheimer, l'hyperphosphorylation de la proteine tau du cytosquelette. Globalement, ces resultats permettent de poser la theorie suivante: l'activite de la iPLA2 pourrait peut-etre retarder l'apparition des premiers signes cliniques de la maladie d'Alzheimer en favorisant les processus sous-jacents de la memoire, voire meme eliminer les declins cognitifs "normalement" associe au vieillissement.;Etant donne qu'elles peuvent influencer la fluidite des membranes, certaines enzymes s'averent d'excellentes candidates pour explorer les mecanismes lies a la plasticite. Ces enzymes, les phospholipases A2 (PLA2), sont considerees comme des gardiennes de l'environnement lipidique. En plus de maintenir l'integrite de la membrane cellulaire, les PLA2 liberent, par l'hydrolyse des phospholipides, divers acides gras dont l'acide docosahexaenoique (DHA ou omega-3). Fait interessant: l'activite des PLA 2 semble perturbee dans des conditions pathologiques ou la memoire s'avere deficiente comme dans le cas de la maladie d'Alzheimer. Curieusement, les effets des PLA2 sont bien connus pour certains systemes cellulaires (ex.: le coeur) mais jusqu'a maintenant, tres peu d'equipes se sont interessees a leur role dans les processus de la memoire... |